..........Les hautes maisons dissimulent aux visiteurs les ruines du Palais Gallien : une porte monumentale, des vestiges de murs elliptiques que l'on ne parcourt pas mais que l'on observe de loin car leur accès est fermé. Il reste si peu de murailles et de portiques que l'on imagine difficilement l'organisation spatiale de cet amphithéâtre, seul monument romain du Bas-Empire, témoin de l'histoire de la ville primitive; et rien sur les lieux mêmes ne vient aider le visiteur à comprendre le plan des ruines antiques et les grandes étapes de leur histoire depuis deux millénaires. ..........En examinant les documents qui depuis le milieu du seizième siècle retracent l'histoire du monument, on reste surpris du désintérêt manifesté à son égard : le Baron de La Bastie note en 1737 dans une communication à l'Académie Royale des Inscriptions et Belles Lettres que "l'amphithéâtre de Bordeaux est peut être le moins connu de ceux dont nous voyons encore des vestiges dans l'étendue du
Royaume, du moins c'est celui dont les Ecrivains ont le moins parlé". Murailles
décriées et détruites sous la Révolution pour faire place à l'extension de la ville,
elles resteront dévalorisées pendant presque tout le XIXème siècle; on lit
en 1843 dans le "Nouveau Conducteur de Bordeaux " à propos du Palais Gallien "il ne reste plus
maintenant que de tristes ruines déparées par des maisons modernes qu'on a construites
alentour". Stendhal, qui affirme dans le "voyage dans le Midi" que
"Bordeaux est, sans contredit, la plus belle ville de France", voit dans
les restes de l'amphithéâtre une "ruine qui n'offre aucune beauté";
mais à la fin du XVIIIème siècle n'avait-on pas déjà désigné ces ruines
comme des "masses informes d'une architecture nue et grossière digne de celle des
Wisigoths"
.
..........Si ces vestiges de nos jours encore "gardent on ne sait quel tragique de statue mutilée qui attire le regard au milieu d'un quartier aux sages et grises façades" (M. Suffran), les ruines de l'amphithéâtre ont de tout temps " prou donné à songer aus gens" comme le notait E. Vinet au XVIème siècle. Les témoignages des visiteurs du Bordeaux ancien permettent de suivre le lent et inexorable démantèlement de l'édifice jusqu'à sa sauvegarde enfin décidée au début du XIXème siècle. Et les nombreux visiteurs actuels ne trouvent dans les guides touristiques que quelques lignes, voire une photographie, qui résument les mille huit cents ans d'histoire du monument.
Les Auteurs
Illustration A : textes évoquant la légende de Galienne, extraits
du Livre des Bouillons (page 475) et de "l'Ausonii burdigalensis" (210 G) de
Vinet
De haut en bas des marches on
peut lire deux citations latinesdont voici les traductions: "Sa femme Galiane fit bâtir le palais de Galiene." "Le Palais de Gallien, comme on l'appelait, ou de Galienne, au sujet duquel les gens ne connaissant pas l'histoire des temps anciens ont composé une légende extraordinaire... Le Palais parait plutôt avoir reçu son nom de Gallien, son véritable fondateur."
Les Auteurs remercient vivement le Personnel des Archives
Municipales de Bordeaux pour sa compétence et sa grande efficacité dans l'aide apportée
à leurs recherches.
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